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La notion de Business Model n’a cessé de gagner en importance ces 10-15 dernières années. Ce terme apparaît pour la première fois en 1954, dans l’un des classiques de P. Drucker intitulé «The Practice of Management». Aujourd’hui, il existe pléthore d’outils, de travaux et de théories sur le sujet. Cependant, sa mise en pratique dans les entreprises reste un exercice délicat.
Un modèle d’affaires décrit comment l’entreprise souhaite créer de la valeur pour ses clients et ses autres parties prenantes ainsi que la manière dont elle va transformer cette valeur en profits. Voici une première définition proposée par Joan Magretta :
«Un business model est une histoire. Une histoire qui raconte comment l’entreprise fonctionne. Un bon business model répond à la question essentielle : «Qui est le client ?» et «Quelle est la valeur que l’on souhaite proposer à ce client ?». Un business model répond également à une question fondamentale que tout manager doit se poser : «Comment l’entreprise va générer des revenus ?» et «Quelle est la logique économique qui explique comment l’entreprise est capable de délivrer de la valeur pour le client à un coût approprié.» 1
Sorti en 2010, le livre « Business Model Generation » (Osterwalder & Pigneur), devenu une référence en matière de business model, propose une autre définition intéressante :
«Un modèle économique (ou business model), décrit les principes selon lesquels une organisation crée, délivre et capture de la valeur.» 2
Ces deux définitions ont en commun la notion de valeur. Selon la définition d’Osterwalder & Pigneur, une entreprise se doit de réfléchir à la valeur qu’elle souhaite créer pour ses clients, à la façon dont elle crée cette valeur et à comment elle la communique ou transfère aux clients. Mais concrètement, qu’est-ce que cela signifie ?
Par définition, une entreprise souhaite proposer «quelque chose» à un/des marché(s) spécifique(s). Or, c’est justement à ce «quelque chose» qu’Osterwalder & Pigneur font référence lorsqu’ils évoquent la notion de proposition de valeur.
Toutes ces questions sont essentielles et sont à l’origine de cette notion de création d’une proposition de valeur. Cependant, répondre à ces questions ne permettra pas de créer un business model. La métaphore proposée par Joan Magretta dans sa définition est intéressante. Elle considère le business model comme une histoire. L’histoire de l’entreprise et de son fonctionnement. Or, pour « écrire » une histoire complète, il faut que cette dernière reflète l’esprit de l’entreprise.
Michael Treacy et Fred Wiersema expliquent dans leur ouvrage « Discipline of Market Leaders » (1995), qu’une entreprise doit, si elle souhaite devenir un leader sur son marché, focaliser son attention sur le type de valeur qu’elle souhaite offrir à ses clients. Les auteurs identifient 3 typologies de valeur. Selon Treacy et Wiersema, une entreprise parviendra à exceller sur son marché si elle dépasse, en termes de valeur proposée aux clients, tous ses concurrents dans l’une de ces 3 typologies et qu’elle est conforme aux normes de son marché dans les deux autres. Ces trois typologies de valeur sont les suivantes3 :
Les entreprises qui choisissent de se «spécialiser» dans cette typologie de valeur, se focalisent sur la livraison d’un produit/service à prix compétitif. De plus, leur client n’aura besoin de faire que peu d’efforts pour obtenir le produit/service qu’il désire. Pas cher et pratique, sont les mots d’ordre de l’excellence opérationnelle.
Les entreprises qui se spécialisent en orientation client retravaillent sans cesse leurs produits/services, dans le but de répondre de façon extrêmement précise aux besoins de leurs clients. Les besoins de ces derniers sont d’ailleurs étudiés « en Live » pour pouvoir y répondre au mieux. Ces sociétés se focalisent sur la valeur que peut générer un client pour l’entreprise tout au long de sa vie et non sur une simple transaction. Leur objectif final est de créer un sentiment d’appartenance fort dans l’esprit du client.
Finalement, les firmes qui choisissent de concentrer leurs efforts sur cette troisième et dernière typologie de valeur sont celles qui challengent sans cesse leurs produits/services pour être les leaders incontestés dans leur marché. Ces entreprises sont très créatives. De plus, leurs processus internes sont courts, ce qui leur permet de rapidement tester leurs nouvelles idées sur leur marché afin de les valider ou non. Quelle solution pourrait être développée demain par un nouveau venu sur mon marché ? C’est la question que se posent ces sociétés sans cesse pour rester dans leur «excellence produit».
Dans le terme modèle d’affaires, on retrouve le mot «affaires», ce qui n’est bien évidemment pas un hasard. En réalité, l’objectif ultime de toute entreprise est toujours de générer des profits. De ce fait, on pourrait penser que la notion de valeur n’a que peu d’importance. Or, au contraire, c’est justement cette valeur qui permettra de générer des profits.
Les marchés concurrentiels d’aujourd’hui sont remplis d’entreprises qui proposent des offres similaires. D’ailleurs, lors de la création d’une société ou d’un changement profond d’une entreprise existante, beaucoup prennent exemple sur le modèle d’affaires de leurs concurrents, ce qui n’est pas une mauvaise idée en soi.
Toutefois, une proposition de valeur qui répond à des besoins que vos concurrents ne comblent pas avec leurs offres, sera votre alliée la plus précieuse pour vous aider à générer des profits plus importants. C’est pour cette raison qu’il est primordial d’avoir un modèle d’affaires et par conséquent, une proposition de valeur, bien définis.
Pour illustrer concrètement ce qu’est un modèle d’affaires et quels sont les différents éléments sur lesquels une entreprise peut créer de la valeur, prenons l’exemple de Dropbox4 :
Dropbox s’est créé pour la simple et bonne raison que son propriétaire oubliait trop souvent sa clé USB et qu’il n’avait, de ce fait, pas accès à certains fichiers informatiques importants en tout temps. Premier élément intéressant dans cet exemple, l’idée de Dropbox est née d’une volonté de répondre à une problématique pouvant toucher une bonne partie de la population.
Dropbox a ensuite construit son modèle d’affaires en gardant trois éléments en tête. Les fondateurs voulaient proposer quelque chose de simple à utiliser, de fiable et d’universel (utilisable par tout type d’individus peu importe leur situation). Ces trois critères ont influencé toutes les décisions prises par l’entreprise depuis sa création.
L’objectif de Dropbox était clair. Peu leur importait leur taux de croissance, ils continueraient à respecter coûte que coûte ces trois critères. C’est le deuxième enseignement de cet exemple. Une fois définie la ligne directrice à suivre au niveau de la valeur qu’une firme souhaite créer pour ses clients, il faut tout faire pour la garder sur la durée.
Pour respecter les trois critères clés de sa proposition de valeur, Dropbox n’a jamais cessé de collaborer avec ses utilisateurs pour améliorer son service cloud. Au final, les utilisateurs d’un produit/service ne sont-ils pas les mieux placés pour juger si l’utilisation de ce dernier est simple et fiable ? Le fait est que, grâce aux retours de ses clients, l’entreprise a sans cesse continué à développer de nouvelles fonctionnalités.
Dans son modèle d’affaires, Dropbox a donc décidé d’accorder une importance capitale à ses clients et d’adopter une relation de co-création avec ces derniers (forums, beta testers, système de votation pour définir les futures fonctionnalités produit, tests produits en live, etc.). Mais attention, toujours en respectant les trois critères de sa proposition de valeur ! Toute recommandation susceptible de briser ces trois critères n’était pas retenue par Dropbox.
Au niveau de ses infrastructures, Dropbox a également su créer une valeur pour l’entreprise. Pour éviter des coûts trop élevés, Dropbox n’héberge pas les dossiers des utilisateurs dans son propre cloud. En effet, l’entreprise utilise un système conçu et appartenant à Amazon. Cet exemple montre que la structure des coûts est aussi un élément essentiel à considérer lors de la création d’un business model et que des alliances peuvent s’avérer extrêmement efficaces lorsqu’il s’agit de développer son modèle d’affaires.
Finalement, et c’est peut-être le plus important, Dropbox a décidé de se démarquer de ce que faisaient beaucoup de ses concurrents en proposant un service dit « Freemium ». Ce modèle de génération de revenus s’appuie sur un principe simple : une offre basique est proposée gratuitement et des offres plus complètes sont payantes. En ciblant un marché de masse, Dropbox a su, grâce à son modèle d’affaires très travaillé, atteindre un nombre si important d’utilisateurs que l’entreprise peut se permettre aujourd’hui de ne compter que 4-5% d’utilisateurs «payants».
Plus tôt dans cet article, nous expliquions l’importance pour une entreprise de focaliser ses efforts dans l’une des trois typologies de valeur présentées par Treacy et Wiersema. Dans l’exemple de Dropbox, l’entreprise est résolument tournée vers l’orientation client. Grâce à sa capacité à maintenir ce focus en tout temps, la société a été capable de développer son cloud en continu avec l’aide de ses clients. Peu importe dans quelle typologie de valeur vous souhaitez vous spécialiser. Gardez votre FOCUS sur cette valeur que vous souhaitez créer et vous maximiserez vos chances de réussite.
La simple idée d’un modèle d’affaires figé, qui n’évolue pas dans le temps, est totalement irréaliste. Vous constaterez que les questions essentielles à se poser lors de l’établissement d’un modèle d’affaires, présentées dans la définition de Joan Magretta en début d’article, sont des questions dont les réponses ne sont pas nécessairement identiques sur la durée. La situation du marché et la réalité des consommateurs évoluent sans cesse. Il est donc absolument fondamental de revoir régulièrement son modèle d’affaires et de le retravailler en permanence.
Être capable de se remettre en question fréquemment, dans une logique d’itération continue, dans le but d’adapter son business model à la réalité de son environnement : voilà la clé d’un business model réussi. D’ailleurs, Dropbox, en est un excellent exemple. En effet, sans des allers-retours réguliers entre ses beta testers, ses consommateurs et ses différents partenaires, l’entreprise n’aurait très certainement pas eu un succès aussi important.
En réalité, toute entreprise existante a un modèle d’affaires. En effet, sans modèle d’affaires il est impossible de générer des revenus et par conséquent, de survivre sur un marché. Il n’est pas si difficile pour une société de réfléchir à ce qu’elle souhaite proposer à son marché. En revanche, il est beaucoup plus compliqué de réfléchir à la façon dont tous les aspects d’une entreprise vont s’imbriquer ensemble dans son modèle d’affaires.
Si l’ouvrage d'Osterwalder & Pigneur (2010) est devenu une référence, c’est justement parce qu’il propose un outil qui rappelle à une entreprise d’intégrer à sa réflexion, divers éléments clés à considérer lors de la création/révision d’un modèle d’affaires.
Lors de la création d’une entreprise, le « Business Model Canvas » peut s’avérer utile pour poser sur papier les bases du concept imaginé, afin de les retravailler par la suite et d’affiner son modèle d’affaires. Cet outil permet également à une société existante de photographier, à un moment précis de son existence, son modèle d’affaires.
Dans les deux cas, cet outil est efficace pour obtenir une vision panoramique d’une société. Cela permet de prendre du recul par rapport à son business, afin de réfléchir à ce qui peut être modifié ou amélioré.
L’outil est constitué de 9 blocs, qui couvrent l’entièreté de la structure de tout modèle d’affaires. En annexes à cet article, vous trouverez le « Business Model Canvas », ainsi qu’une brève explication des blocs qui le forment.
Comme mentionné précédemment, cet outil est très efficace pour analyser la situation globale du modèle d’affaires d’une société à un moment donné. Il est notamment très puissant lorsqu’il est utilisé lors de workshops ou de sessions de brainstorming. En revanche, il ne donne que très peu, pour ne pas dire pas du tout, de conseils sur la mise en place pratique des différents éléments expliqués dans le canevas.
Cet outil est très bon car il est simple et intuitif. Il permet à tout un chacun de réfléchir à la situation actuelle de son modèle d’affaires. Chez M&BD Consulting, nous l’utilisons parfois pour aider nos clients à poser sur papier leur modèle d’affaires et nous recommandons cet outil pour sa capacité à encourager la réflexion. Par contre, pour passer de cette phase de réflexion à la mise en place concrète des idées générées, il n’est pas suffisant.
Un modèle d’affaires peut tenir sur quelques lignes et n’est pas nécessairement compliqué à expliquer. Mais attention, même si ce modèle peut donner l’impression qu’il s’agit de quelque chose de très simple, il est important de garder à l’esprit que créer et mettre en place un modèle d’affaires est un exercice complexe. C’est pour cette raison que nous vous conseillons fortement de faire appel à un professionnel si vous cherchez à créer ou à redéfinir votre modèle d’affaires.
Nous l’avons dit, le cœur même de tout modèle d’affaires est la proposition de valeur qu’une société souhaite offrir à ses clients. La première étape consiste donc logiquement à identifier les différents groupes de clients, en fonction des besoins de ces derniers et de leurs caractéristiques propres, auxquels l’entreprise souhaite proposer son offre.
Une fois les différents groupes de clients définis, l’entreprise pourra commencer à réfléchir à la proposition de valeur qu’elle souhaite offrir à chacun des groupes. Puisque chaque groupe de clients a des besoins et des attentes spécifiques, il est tout à fait possible d’avoir, pour une même entreprise, différentes propositions de valeur.
Il s’agira ensuite de définir les différents canaux de communication et de distribution qui seront utilisés pour communiquer et transférer cette valeur aux clients: les vendeurs, le site internet, les réseaux sociaux, les points de vente, les partenaires de livraison, etc. Ils sont tous « des canaux » en contact plus ou moins direct avec les clients. Leur importance dans un modèle d’affaires est capitale car ils forment l’image d’une entreprise. Or, si l’image perçue par le client est mauvaise, l’entreprise n’arrivera pas à avoir un modèle d’affaires efficace.
L’étape suivante consiste à déterminer le type de relation qu’une entreprise souhaite créer et entretenir avec chacun de ses groupes de clients. Assistances personnelles disponibles pour un groupe spécifique, systèmes de co-création avec un autre groupe plus engagé, un troisième groupe qui n’a pas besoin de relation particulière avec l’entreprise, etc. Fixer ces éléments permet à une société d’analyser si le reste de son modèle d’affaires est aligné avec ses différentes relations souhaitées.
Réfléchir à la façon dont l’entreprise souhaite créer de la valeur pour ses clients est essentiel. Cependant, pour pouvoir vivre, une entreprise a besoin de revenus. Que veut-t-elle vendre concrètement ? Combien et comment les différents groupes de clients sont prêts à payer pour la valeur proposée ? À nouveau, une entreprise ne doit pas forcément avoir un seul et unique système de génération de revenus. Là encore, tout dépendra du groupe de clients.
En fonction de la valeur que souhaite créer l’entreprise et de la façon dont elle souhaite la transférer à ses clients, celle-ci nécessitera plus ou moins de ressources. Pour construire un modèle d’affaires efficace et pertinent, l’analyse des ressources humaines, physiques, financières ou encore intellectuelles nécessaires, est absolument fondamentale.
Dans cette rubrique, le modèle pousse l’entreprise à réfléchir aux activités quotidiennes qui font qu’elle est capable de générer de la valeur pour ses clients. Si l’entreprise est active dans le retail par exemple, une activité « vitale » pour qu’elle puisse continuer à générer de la valeur, est l’approvisionnement. Si elle n’a rien à vendre, elle ne pourra pas continuer à exister. Définir ces activités capitales permet à une entreprise de prendre conscience de l’importance de ces dernières et d’y allouer les ressources nécessaires.
Une entreprise peut difficilement survivre sans partenaires. Ces partenaires peuvent être des prestataires de services disposant de compétences que la société n’a pas à l’interne, ou encore des entreprises concurrentes ou non concurrentes avec lesquelles une entreprise décide de former une alliance. Qu’est-ce qui, dans la proposition de valeur d’une société, nécessite les compétences ou les savoir-faire de partenaires externes ? Réfléchir et répondre à cette question est essentiel pour développer un modèle d’affaires robuste.
La mise en place de tous les éléments expliqués précédemment engendrent des coûts. Or, il est primordial pour une entreprise de les repérer et de les considérer dans l’élaboration d’un business model. Si la structure des coûts n’est pas clairement définie, une entreprise aura beaucoup de difficultés à être rentable sur le moyen-long terme.
1 Ovans, A. (2015). What Is a Business Model?. Harvard Business Review. https://hbr.org/2015/01/what-is-a-business-model.
2 Osterwalder, A. et Pigneur, Y. (2010). Business Model Generation. Chichester: John Wiley & Sons Ltd.
3 Treacy, M. et Wiersema, F. (1995). The Discipline of Market Leaders. USA: Allison-Wesley.
4 Eisenmann, T., Pao, M. et Barley, L. (2014). Dropbox: "It Just Works." Harvard Business School, (9-811-065).